dimanche 27 novembre 2011

Les chansons de geste

On donne le nom de Chansons de Geste (en latin du Moyen âge Cantilena) aux poèmes épiques composés en langue française au Moyen âge et destinés jusqu'à une époque tardive à être chantés en public, comme les rapsodies des anciens Grecs, au son d'un instrument de musique. Ce genre est nettement caractérisé par le choix des sujets, le plus souvent empruntés à des traditions nationales, par certaines habitudes de style, certains lieux communs, enfin par la versification en tirades ou laisses monorimes, c.-à-d. en couplets formés d'un nombre très variable de vers égaux de huit, dix ou douze syllabes, liés par la même rime ou plus anciennement par la même assonance (Littérature française).


Dans le latin parlé à la fin de l'Empire, particulièrement en Gaule, le pluriel neutre gesta (actions) était devenu un terme collectif de genre féminin, avec le sens d'histoire qu'il offre dans les textes bas-latins et parfois en français. Quand la conquête franque eut introduit l'usage germanique de chanter les événements et les héros contemporains ou traditionnels, d'abord dans la langue des envahisseurs, puis dans celle des vaincus, la récitation musicale de l'épopée fut désignée par l'expression chanter de geste. Les jongleurs qui s'y adonnèrent furent qualifiés jongleurs de geste. Les poèmes qu'ils chantaient, et qui restèrent longtemps la seule histoire en langue vulgaire, histoire populaire, passionnée, dépourvue de critique, mais (à l'origine du moins) sincère et presque véridique, s'appelèrent chansons de geste. Cet emploi du mot geste se retrouve dans le Midi provençal et dans des littératures étrangères qui ont subi l'influence de l'épopée française : ainsi les Espagnols ont traduit chanson de geste par cantare de gesta. On a dit quelquefois en France une geste pour une chanson de geste; et ce mot, transporté de l'autre côté de la Manche, y a pris, à l'époque de la décadence de l'épopée et de la classe qui la chantait, le sens actuel de l'anglais jest (plaisanterie, farce).

Geste désigne également, au Moyen âge, un ensemble de traditions et de récits épiques et, par extension, une famille de héros nationaux, comme nous apprend l'auteur de Girart de Vienne :

N'ot ke III gestes en France la garnie:
Don roi de France est la plus seignorie

Les trois cycles principaux de l'épopée française sont rattachés à trois grandes familles, à trois groupes de personnages historiques ou légendaires : la geste du roi [Charlemagne], la geste de Guillaume d'Orange ou de Garin de Monglane, la geste de Doon de Mayence. Dans un sens plus général, on a dit la geste Ganelon, pour flétrir les traîtres, la geste Mahom, en parlant des mahométans, des Sarrasins. (...)


Il est aujourd'hui hors de doute que les chansons de gestes ont pris naissance chez les Trouvères, dans le domaine de la langue d'oil. Elles furent vraisemblablement l'amplification des chants guerriers (les cantilènes proprement dites), dont on trouve des échantillons dans le recueil de poésies populaires latines publié par Edelestand du Méril : c'est ce que permet de supposer un fragment d'une épopée intitulée Gormond et Isembard, laquelle est bâtie sur le chant composé en mémoire de la victoire de Louis III sur les Vikings en 882. (Ernest Muret / B.).


En bibliothèque - Wolf, Sur les poèmes épiques des anciens Français, en allem., Vienne, 1838, in-8°. - Paulin Paris, les Chansons de geste, Paris, 1859, broch. in-8°. - Ch. d'Héricault, Essai sur l'origine de l'épopée française et sur son histoire au Moyen âge, Paris, 1860, in-8°. - Paul Bancourt, Les musulmans dans les chansons de geste du cycle du roi (2 tomes), Plublications de l'université de Provence, 1982.

En librairie - François Suard, La chanson de geste, PUF (QSJ), 2003. - Dominique Boutet, Jehan de Lanson, technique et esthétique de la chanson de geste au XIIIe siècle, Rue d'Ulm, 1988. - Huguette Legros, L'amitié dans les chansons de geste à l'époque romaine, Publication de l'université de Provence, 2001. - Collectif, Au carrefour des routes d'Europe : la chanson de geste (colloque), Publications de l'université de Provence, 1987. - Alain Labbé, L'architecture des palais et des jardins dans les chansons de geste (essais sur le thème du roi en majesté), Slatkine, 1997. - Francine Mora-Lebrun, L'Enéide médiévale et la Chanson de geste, Honoré Champion, 1994. - De la même, L'Enéide médiévale et la naissance du roman, PUF, 1992. - Jean-Charles Herbin, Chanson de geste et tradition épique en France au Moyen âge, Paradigme, 1994. - Collectif, Comprendre et aimer la chanson de Geste (A propos d'Aliscans), ENS Editions. Italo Siciliano, Les chansons de geste et l'épopée, mythes, histoire, poèmes, Slatkine, 1979.

http://www.cosmovisions.com/textGeste.htm et Youtube pour les vidéos

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