lundi 16 janvier 2012

Jean de Meung


Jean de Meung écrivant. Peinture du Maître de Jouvenel. Enluminure extraite d'un manuscrit du XVe siècle du Roman de la Rose de Guillaume de Lorris et Jean de Meung. (Bibliothèque nationale de France, Paris.)Ph. Coll. Archives Larbor

Jean de Meun ou de Meung (Jean Clopinel dit). - Célèbre trouvère né à Meung-sur-Loire (Loiret) vers 1250, mort au commencement du XIVe siècle. On sait peu de chose de sa biographie. Venu sans doute comme étudiant à l'université de Paris, il paraît avoir passé la plus grande partie de sa vie dans cette ville, où il habitait en dernier lieu une maison de la rue Saint-Jacques (à peu près au numéro actuel 218), qui fut donnée après sa mort, en 1305, aux frères prêcheurs par maître Adam d'Andeli.

Le premier et le plus célèbre de ses ouvrages est la fin du Roman de la Rose : laissé interrompu, vers 1237, par Guillaume de Lorris qui n'en avait écrit que 4 070 vers, le Roman de la Rose n'aurait probablement pas laissé de traces sans la continuation de Jean de Meun qui compte près de 49 000 vers : c'est vers 1280 que Jean de Meun paraît avoir terminé cet immense poème.

Jean de Meung traduisit en 1284 en français le traité De Re Militari de Végèce sous le titre Le livre de Végèce de l'art de chevalerie. Il créa aussi une version spirituelle, la première en français, des lettres d'Abélard et Héloïse. Un manuscrit du XIVe siècle de cette traduction à la Bibliothèque Nationale porte des annotations de Pétrarque. Sa traduction de De consolatione philosophiae de Boèce est précédée par une lettre à Philippe le Bel où il énumère ses travaux précédents, dont deux sont perdus : De spirituelle amitié tiré de De spirituali amicitia d'Aelred de Rievaulx (décédé en 1167) et Le Livre des merveilles d'Hirlande tiré de la Topographia Hibernica, ou De Mirabilibus Hiberniae de Giraldus Cambrensis (Gerald de Barri). Ses dernières poésies sont indubitablement son Testament et son Codicille. Le Testament est écrit en quatrains monorimes et contient des conseils destinés aux classes différentes de la société. Il est également l'auteur du "Dodechedron de fortune" Paris, Etienne Groulleau 1556.

Là s'arrête la liste des œuvres authentiques de Jean de Meung ; la réputation dont il a joui lui a valu l'attribution d'un grand nombre d'ouvrages apocryphes qu'il est inutile de mentionner.

Le Testament de Jean de Meung et sa traduction de Boèce ont eu beaucoup de vogue au XIVe et au XVe siècle, à en juger par le nombre des manuscrits qui nous les ont conservés plus ou moins fidèlement, mais cette vogue n'a pas dépassé le Moyen âge, et c'est surtout comme principal auteur du Roman de la Rose que Jean de Meun a été et reste célèbre. En acceptant le cadre imaginé par son devancier, le continuateur de Guillaume de Lorris l'a rempli d'un esprit tout différent. Autant le premier auteur du Roman de la Rose est délicat, autant le second est grossier, et il y a entre eux une antithèse presque aussi violente que celle qui existe entre la poésie lyrique courtoise du temps de Philippe-Auguste et les fabliaux : Guillaume de Lorris est l'humble serviteur des dames et Jean de Meung les accable des plus sanglantes injures ; le premier réprouve sévèrement la fausseté dans l'amour, le second traite la loyauté de niaiserie. Comme œuvre d'art et de morale, la seconde partie du Roman de la Rose est inférieure à la première, mais elle est aussi beaucoup plus personnelle et plus vivante, et l'on y sent un tempérament vigoureux servi par une robuste érudition chez cet homme que l'on se représentait, dans les générations qui l'ont immédiatement suivi, comme "solennel maistre et docteur en sainte théologie, philosophe très profond, sachant tout ce qui à entendement humain est scible".
ll y a du Rabelais chez Jean de Meung; on peut même dire, avec Gaston Paris, qu'il fut "le Voltaire du Moyen âge, avec toutes les restrictions que comporte ce compliment".

Le succès du Roman de la Rose a dépassé celui de toutes les œuvres littéraires du Moyen âge : on en tonnait plus de 200 manuscrits, dispersés dans toutes les bibliothèques de l'Europe; il a été imprimé à plusieurs reprises sous sa forme primitive dès les débuts de l'imprimerie et jusqu'au commencement du XVIe siècle, où Marot en fit un rajeunissement qui retrouva presque chez ses contemporains la vogue que l'original avait eu chez ceux de Jean de Meung. Son influence a pesé lourdement sur la littérature française du XIVe et du XVe siècle et peut se comparer à celle de Pétrarque sur la littérature italienne du XVe siècle : c'est dire qu'elle n'a pas été très heureuse. Ce n'est pas que Jean de Meung n'ait été vivement attaqué pendant la période dominatrice du Roman de la Rose Guillaume de Digulleville, Christine de Pisan, Gerson ont fulminé contre lui, mais ils se plaçaient sur le terrain de la morale et de la religion et non sur celui de la littérature.

A l'étranger, le Roman de la Rose a pénétré presque partout dès la fin du XIIIe siècle : il a été mis en vers flamands par Henri van Aken, en sonnets italiens par un certain Durante, contemporain de Dante, en anglais par Chaucer, etc. Des trois éditions qui ont été publiées dans ce siècle de ce célèbre poème par Méon (Paris, 1813, 4 vol. in-8), par Francisque Michel (Paris, 1864, 2 vol. in-42) et par Croissandeau (Orléans , 1879, 5 vol. in-42, avec une traduction en vers en français moderne). (A. Thomas).

Wikipédia, Cosmovision et l'encyclopédie Larousse en ligne pour l'enluminure

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